Silence. Concentration. Le DJ va passer le morceau à retrouver. Dès la première note, on entend « j’ai, j’ai, j’ai » comme sur un terrain de volley. Les cris s’enchaînent. « Rihaaaaaaana », « Beyoooooncé », « MaryJJJJJJJBlidge ». La folie blind test est loin de ses débuts en tant que pratique marketing. De la dégustation à l’aveugle au bon moment entre copains, comment ce « party game » est-il devenu un incontournable des soirées ?
Coca-Cola Vs Bordeaux
Dans les années 60, le blind test est loin de l’univers musical. C’est une pratique marketing utilisée pour que le consommateur puisse émettre son opinion sans être influencé par le nom, la marque ou le packaging d’un produit. Pratiqué par des géants comme Coca-Cola, le blind test est surtout initié pour se différencier de concurrents.
Au même moment, en France, on est plus blind test de boissons à base de raisins que sodas. On parle de dégustations à l’aveugle, on goûte des vins, et on essaie de retrouver simplement avec son palet et ses yeux, le cépage principal, le pays d’origine, l’appellation, le millésime et si possible le producteur… Aujourd’hui, la dégustation à l’aveugle à son championnat du monde. Et ce sont les suédois qui ont remporté la bataille en 2017.
Du goût au son
Après avoir expérimenté le goût, le blind test arrive dans l’univers musical. On ne devine plus des produits alimentaires mais des morceaux de musique. La pratique se popularise dans les années 80 avec Thierry Ardisson et son acolyte Philippe Corti, DJ aux Bains Douches à cette période. Dans la célèbre émission « Lunettes noires pour nuits blanches », ils font deviner des titres de chansons, des noms d’artistes, aux personnalités invitées sur le plateau. Le premier à se prêter au jeu est Etienne Daho.
« Il va te passer un disque. D’abord, il faut que tu le reconnaisses. Puis ensuite, que tu me dises ce que ça t’évoques. » propose comme consigne Thierry Ardisson.
La recette fonctionne à merveille. Ce sont des dizaines d’artistes qui s’essaient à ce nouveau jeu : Alain Bashung, Catherine Lara, Serge Gainsbourg,…
Du petit écran à l’écran d’ordinateur
Naturellement, le blind test devient un jeu que l’on reproduit chez soi. Thierry Ardisson a utilisé ce jeu musical dans toutes ses émissions de « Lunettes noires pour nuits blanches » dans les années 80 à « Tout le monde en parle » dans les années 2000, convertissant ainsi toute une génération de « blind-testeurs ».
Aujourd’hui, le blind test est ce jeu populaire que l’on retrouve partout. Il peut être à la fois thématique, pointu, expérimental, beauf, romantique, bruyant, à l’ardoise,… La pratique du blind test est éclectique, sans cesse renouvelée.
Pour ceux qui auraient tendance à minimiser cet art, on vous recommande quelques expert.e.s comme Nadia Ahmane et ses blind-tests enflammés (même si elle a raccroché les écouteurs comme on dit dans le jargon), ou le formidable Sourdo Blindtest complètement addictif (site réalisé par le collectif Sourdoreille en partenariat avec Deezer).
Crédit photo : Nouvel Obs